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Un coup d'Etat à la chambre basse du Parlement algérien !
C’est un véritable coup d’Etat qui se prépare actuellement à l’Assemblée populaire nationale (APN) en Algérie, après que des députés frondeurs ont bloqué l'entrée de l’hémicycle et empêché son président, Saïd Bouhadja, d’y accéder pour le forcer ainsi à démissionner.
A défaut de pouvoir pousser à la porte le président de la chambre basse du Parlement, les députés de cinq groupes parlementaires, pilotés par le Front de Libération Nationale (FLN) du chef de l'Etat Abdelaziz Bouteflika et le Rassemblement National Démocratique (RND) du Premier ministre Ahmed Ouyahia, ont carrément cadenassé la porte du bâtiment.
Un acte qualifié par l’opposition d’"incivique", "illégal", "illégitime", voire "voyou, tant il constitue une dérive dangereuse et un dérapage "grave" qui risquent, appréhende-elle, de déteindre dorénavant sur l’ensemble des assemblées élues et des institutions de la République.
En effet, la décision des membres du Bureau de l'APN de se réunir, mercredi, pour constater la vacance de la présidence de l'Assemblée, a fait réagir plusieurs partis d’opposition et des organisations de la société civile, notamment le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) et le Mouvement pour la société et pour la paix (MSP).
"Des députés s’apprêtent à commettre un coup d’Etat à l’Assemblée nationale sous couvert de l’annonce d’une vacance du poste de président. S’il venait à être toléré voire validé, ce renversement du président de l’Assemblée nationale de façon illégale par des individus hors la loi et sans aucune autorité, marquera une nouvelle étape de la dérive autoritaire des clans dominant à l’intérieur du système", écrit le président du RCD, Mohcine Belabbas, sur sa page Facebook.
Il estime, à cet égard, que "cadenasser le portail de l’APN, c’est lancer le message que dans ce pays, c’est le règne de l’anarchie", expliquant qu’autrement dit, n’importe qui peut désormais aller cadenasser le siège d’une wilaya, d’une daïra ou d’une APC, voire même le siège de la Présidence, puisque des députés ont montré la voie.
Faisant porter l’entière responsabilité d’un tel dérapage au tandem FLN-RND au pouvoir, M. Belabbas se dit davantage "outré" que les mêmes députés aient procédé à "l’évacuation manu militari" des employés de l’APN, au vu et au su des forces de sécurité censées intervenir pour protéger l’APN en tant qu’institution de la République.
Un point de vue que partage Abderrezak Makri, président du MSP, qui s’est également exprimé sur sa page facebook, en considérant que les efforts consentis par les partis et les personnalités politiques pour tenter d’éviter "l’effondrement de l’Etat malade", se sont avérés insuffisants.
"La situation en Algérie est telle que le peuple doit s’impliquer et ne pas rester spectateur, au risque que le ciel nous tombe tous sur la tête", s’indigne-t-il.
Pour le chef du MSP, le président contesté de l’APN, Saïd Bouhadja, est dans son droit de demander l’intervention des services de sécurité pour protéger l’institution, et ces députés réfractaires à la Constitution et au règlement de l’Assemblée doivent, estime-t-il, répondre de leurs actes.
Même son de cloche chez Lakhdar Benkhellaf, chef du groupe parlementaire de l’alliance Al Adla-El Bina-Ennahda, qui dénonce, à ce titre, une "entrave inacceptable à la liberté de travail". Jugeant, également, leur action "anticonstitutionnelle, illégitime et illégale", M. Benkhellaf accuse les anti-Bouhadja de favoriser la "loi de la jungle" en transposant à l’hémicycle des problèmes internes à leurs partis.
Ce précédent, prévient-il, risque de provoquer une désobéissance civile dans les jours à venir. "Il sera dorénavant difficile de demander aux citoyens de respecter les lois tant que ceux-là mêmes qui légifèrent et votent ces lois les ont piétinées", a-t-il commenté.
A son tour, Sadek Slimani, chef du groupe parlementaire du FFS, dénonce "un manque de civisme" chez les meneurs de la fronde contre le président de l’APN, et "une situation dramatique" qui rend difficile toute analyse politique. Abondant dans le même sens, le chef du groupe parlementaire du MSP, Ahmed Sadok, dénonce, également, "un acte incivique" et "une mascarade" qui, dit-il, nécessite l’intervention de qui de droit pour sauver l’image du pays, une image déjà peu reluisante.
D’autres observateurs déplorent qu’à court d’arguments recevables dans leur guerre ouverte contre quelqu’un qui était jusqu’à un passé récent un des leurs, les contestataires décident d’user, ni plus ni moins, de la violence physique pour amener le président de l’APN à jeter les armes.
En effet, après avoir procédé au blocage de l’entrée principale du siège de l’Assemblée, les députés contestataires ont tenu une réunion pour décider des suites à donner à leur action. À l’issue du conclave, ils ont rendu publique une déclaration qui traduit plus leur désarroi que leur détermination.
"Devant la situation qui prévaut à l’APN et vu la transgression du règlement intérieur et suite à la levée de la couverture politique de M. Bouhadja qui appartient au groupe du FLN, nous appelons le bureau de l’Assemblée à prendre les mesures qui s’imposent", indiquent-ils.
Ce bras de fer entre les acteurs du système renseigne sur le délitement des institutions en Algérie et le niveau de l’exercice politique et de responsabilité aussi. Mais d’aucuns estiment qu’il n’y a pas lieu de s’étonner, outre mesure, de ce qui se déroule actuellement au palais Zighoud-Youcef, tant est que la violence est consubstantielle au système politique algérien.
Source : MAP