Startups marocaines : une levée record de 95 millions de dollars en 2024
Le Maroc signe une année exceptionnelle dans l’univers des startups africaines, avec près de 95 millions de dollars levés en 2024, contre seulement 33 millions en 2023. Une progression fulgurante qui propulse le Royaume au 6ᵉ rang africain des écosystèmes les plus financés, derrière le Nigeria, l’Afrique du Sud, l’Égypte, le Kenya et le Ghana. Un exploit d’autant plus notable qu’il intervient dans un contexte mondial marqué par la prudence des investisseurs face aux incertitudes économiques.
Mais cette montée en puissance ne doit pas masquer les fragilités persistantes du paysage startup marocain. Selon le Morocco Startup Ecosystem Report 2024, publié par l’Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P), l’écosystème reste jeune, inégalement structuré et encore trop concentré sur certaines zones géographiques. À cela s’ajoutent un accès limité au financement de croissance, un faible nombre de sorties (exits) et une dépendance excessive à quelques acteurs dominants.
La progression des levées de fonds est impressionnante : 94,96 millions de dollars en 2024, contre 33,26 millions en 2023 et 26,2 millions en 2022. Mais à y regarder de plus près, trois startups concentrent à elles seules près de 65 % du total levé. En tête de file, Nuitée, pépite de la TravelTech marocaine, réalise une levée record de 48 millions de dollars en série A, faisant d’elle la plus grosse opération de l’année.
Derrière ce succès phare, des startups prometteuses comme YoLa Fresh, spécialisée dans la distribution digitale de fruits et légumes, ont levé 7 millions de dollars, tandis que la fintech Inyad, orientée vers les PME, s’est également distinguée.
Le secteur de la TravelTech, porté par l’élan touristique post-Covid et le positionnement stratégique du Maroc, capte plus de 53 % des fonds levés. La logistique et la mobilité suivent avec 12 %, renforcées par l’ambition du Royaume de devenir un hub régional entre l’Europe et l’Afrique.
La FinTech, qui ne représente que 11,6 % des volumes investis, domine toutefois en nombre d’opérations, montrant une dynamique forte autour de solutions agiles et digitales telles que Tookeez, ORA Technologies ou Inyad.
D’autres filières émergent timidement mais avec ambition. L’AgriTech bénéficie du soutien des politiques de modernisation du secteur agricole et capte environ 10 % des financements. La DeepTech, encore à un stade exploratoire, représente aussi 10 % des deals, portée par UM6P Ventures, très active dans l’accompagnement des projets à haute intensité technologique.
Malgré ces signaux positifs, les auteurs du rapport soulignent l’urgence d’un renforcement structurel : soutien aux scale-ups, développement de mécanismes d’investissement régionaux, et meilleure gouvernance de l’innovation. Car si la courbe est ascendante, la durabilité de la croissance dépendra d’un écosystème plus équilibré, inclusif et orienté vers l’internationalisation.
Avec une telle percée, le Maroc s’inscrit résolument dans la cartographie des nations tech en Afrique. Mais pour transformer l’essai, il lui faudra franchir un nouveau cap : consolider les bases, élargir l’accès au capital et créer des champions capables de rayonner au-delà du continent.