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Agriculture marocaine : entre dépendance fossile et transition agroécologique
Alors que les systèmes alimentaires mondiaux consomment plus de 15% de l’énergie fossile globale, le Maroc, à l’image de nombreux pays, cherche l’équilibre entre production agricole performante et transition écologique. Le rapport Fuel to Fork du Panel international d’experts sur les systèmes alimentaires durables (IPES-Food) tire la sonnette d’alarme : l’agriculture industrielle actuelle, centrée sur les monocultures, l’usage intensif des engrais chimiques et la mécanisation, est l’un des moteurs majeurs des émissions de gaz à effet de serre.
Une dépendance marocaine à modérer
Au Maroc, l’usage d’engrais reste largement tributaire des énergies fossiles, notamment via les engrais azotés produits à partir de gaz naturel. Lamiae Ghaouti, directrice de l’INRA, relativise cependant : « Le Maroc est dépendant, mais dans des proportions modérées. » En 2022, la moyenne d’utilisation d’engrais atteignait 53,5 kg/ha, avec des disparités selon les régions.
Les fluctuations géopolitiques et la volatilité des prix de l’énergie mettent en lumière une vulnérabilité structurelle du secteur. En réponse, la stratégie Génération Green 2020-2030 promeut une agriculture durable, intégrant semis direct, biofertilisants et énergies renouvelables. Des projets pilotes, testant légumineuses, compost enrichi ou encore biochar, sont actuellement menés sur différents territoires.
Des freins économiques tenaces
Mais pour Rachid Benali, président de la COMADER, la priorité est ailleurs : « Ce n’est pas une question d’environnement, c’est une question de trésorerie. » La flambée des prix des engrais azotés a déjà provoqué une baisse d’utilisation et donc une chute des rendements. « Remplacer les engrais azotés ? C’est comme produire sans eau. Ce n’est pas réaliste aujourd’hui », affirme-t-il.
Le Maroc, bien qu’exportateur de phosphates, importe l’azote, élément clé des engrais les plus utilisés. En l’absence de solutions alternatives matures et abordables, les agriculteurs restent piégés dans un cercle où rendement et rentabilité imposent le recours aux intrants fossiles.
Une chaîne agroalimentaire sous pression
La pression ne s’arrête pas au champ. Pour Mouneim El Eulj, président de la FENAGRI, toute la chaîne agroalimentaire – de la production à la transformation en passant par la logistique – subit de plein fouet les coûts de l’énergie. Transport réfrigéré, carburants, emballages plastiques… Les hausses touchent chaque maillon, avec à la clé une baisse de compétitivité à l’export et une montée des prix pour les consommateurs.
Des signaux positifs émergent cependant. Des entreprises comme Lesieur Cristal, Danone ou Nestlé Maroc investissent dans le solaire, la biomasse et d’autres solutions d’efficacité énergétique. Les emballages se réinventent aussi, moins gourmands en pétrole ou issus de plastiques recyclés.
L’agroécologie : promesse ou utopie ?
L’agroécologie, souvent présentée comme l’alternative durable, peine encore à convaincre sur le terrain. « Ce n’est pas une substitution simple. Il s’agit d’un changement de paradigme », souligne Ghaouti. Le manque de formation, de soutien technique et de financements adaptés freine l’adoption à grande échelle.
Des zones pilotes testent pourtant le modèle : semis direct dans le Saïss, biofertilisants dans le Loukkos, rotations avec légumineuses dans le Souss… Et des espèces résilientes comme le cactus ou l’arganier sont promues, tandis que 78 variétés adaptées sont déjà inscrites au catalogue agricole national.
Une équation délicate à résoudre
Alors que l’agriculture représente 14% du PIB national et 33% des emplois, la transition énergétique du secteur est une urgence... mais aussi un casse-tête. Entre les exigences de production et les limites écologiques, les solutions demandent coordination, vision stratégique et accompagnement concret.
Trois acteurs – INRA, COMADER, FENAGRI – incarnent aujourd’hui les visions divergentes mais complémentaires d’un futur agricole marocain. Reste à savoir si la volonté politique et les moyens économiques permettront au Royaume de sortir d’un modèle fossile-dépendant… sans sacrifier sa sécurité alimentaire.
Le Maroc est à la croisée des chemins. L’agroécologie s’impose comme une réponse durable, mais sa concrétisation nécessitera bien plus que des projets pilotes : un véritable changement de cap, soutenu par des politiques publiques ambitieuses, un accompagnement de terrain, et un accès équitable aux ressources pour tous les agriculteurs.