Smart Grid : le Maroc mise sur l’énergie connectée

Le Maroc franchit une nouvelle étape dans sa transition énergétique avec le lancement de la première plateforme Smart Grid d’Afrique, pilotée par l’Office National de l’Électricité et de l’Eau Potable (ONEE). Installée au Centre des sciences et techniques de l’électricité (CSTE), cette infrastructure innovante ouvre la voie à une gestion plus intelligente, durable et participative de l’énergie. Le projet, financé par la Banque africaine de développement à hauteur de plus de 4 millions de dirhams, illustre la volonté du Royaume de consolider son rôle de leader africain en matière de transition énergétique.

Depuis la COP-22 de Marrakech, le Maroc a multiplié les initiatives pour verdir son économie et moderniser ses infrastructures. Sous l’impulsion royale, le pays a développé les énergies renouvelables, encouragé la production décentralisée et désormais investi dans les réseaux intelligents, conformément au Nouveau Modèle de Développement, qui vise un accès compétitif à une électricité propre sur tout le territoire. Le Smart Grids Test Lab de Benguérir, intégré au Green & Smart Building Park, constitue un centre de recherche unique en Afrique dédié à l’expérimentation et à l’innovation dans les réseaux électriques du futur.

Les Smart Grids promettent de transformer profondément la production, la consommation et la gestion de l’énergie. Ces réseaux, équipés de technologies de surveillance et de pilotage en temps réel, permettent d’ajuster instantanément la distribution d’électricité selon la demande, limitant le gaspillage et les déséquilibres. Ils facilitent également l’intégration des énergies renouvelables intermittentes, telles que le solaire et l’éolien, rendant le mix énergétique plus stable et plus vert.

Cette transformation place le citoyen au cœur du dispositif. Chaque foyer ou entreprise peut devenir producteur d’énergie, injectant ses surplus dans le réseau grâce aux panneaux solaires ou aux petites éoliennes domestiques. Les compteurs intelligents, véritables piliers du système, transmettent les données de consommation en temps réel, offrant une visibilité précise sur l’usage énergétique et permettant d’adopter de meilleures pratiques ou d’investir dans des équipements plus performants.

Selon le consultant en transition énergétique Said Guemra, cité par Challenge, ces technologies relient l’électricité au numérique. La Big Data permet de suivre le profil énergétique des utilisateurs, de détecter des gaspillages ou des anomalies, et d’optimiser la consommation. Les gains d’efficacité peuvent atteindre 40 %, un progrès significatif vers la sobriété énergétique.

Si le déploiement à grande échelle reste complexe, il est porteur de perspectives prometteuses. L’installation progressive de compteurs intelligents, amorcée depuis 2021 pour les gros consommateurs, marque une première étape vers une gestion optimisée du réseau, permettant d’équilibrer l’offre et la demande, d’intégrer davantage d’énergies renouvelables et de réagir plus rapidement aux variations.

Les experts soulignent que le succès de cette transition dépendra à la fois d’investissements soutenus dans les infrastructures et d’une participation active des citoyens. L’adoption généralisée des compteurs intelligents, combinée à des mesures législatives incitatives, modernisera le système électrique tout en plaçant les usagers au centre du changement.

À l’échelle mondiale, le marché des Smart Grids connaît une croissance rapide. Évalué à plus de 60 milliards de dollars en 2023, il devrait progresser de plus de 10 % par an jusqu’en 2032, stimulé par la digitalisation du secteur et la nécessité de réduire les émissions de carbone. Dans ce contexte, le Maroc se positionne avec stratégie sur un secteur d’avenir où innovation, durabilité et souveraineté énergétique se rejoignent.