Automobile : le Maroc renforce sa compétitivité et bouscule l’Espagne

Le secteur automobile marocain connaît une expansion fulgurante, séduisant les investisseurs internationaux par des coûts de production attractifs et des infrastructures de pointe. Cette croissance rapide suscite des inquiétudes notables en Espagne, particulièrement face aux projets de relocalisation de certains modèles emblématiques comme la Citroën C4 vers le Royaume chérifien.

Un Maroc en Pleine Ascension Industrielle

Le Maroc s'affirme désormais comme un acteur incontournable de l'industrie automobile mondiale. Grâce à des initiatives gouvernementales ambitieuses, le pays a développé des infrastructures modernes, favorisé l'énergie renouvelable à moindre coût et exploité une main-d'œuvre qualifiée et compétitive. Ces atouts ont permis d'attirer de grands noms de l'automobile tels que Renault et Stellantis, renforçant ainsi la position du Maroc sur la scène internationale.

L'une des réussites majeures est l'expansion du complexe industriel « Automotive City » à Tanger Med, qui s'étend désormais sur plus de 1 200 hectares. Cette plateforme multifonctionnelle est conçue pour accueillir une production annuelle de plus d'un million de véhicules destinés à l'exportation, consolidant ainsi le Maroc comme un hub stratégique pour les constructeurs automobiles.

La Relocalisation Vers Kénitra : Une Source de Tensions

L'usine de Stellantis à Villaverde, Madrid, symbole de l'industrie automobile espagnole, est au cœur des préoccupations. Actuellement productrice des modèles Citroën C4 et C4 X pour le marché mondial, cette usine pourrait voir sa production déplacée à Kénitra, au Maroc, dès 2027. Cette décision s'inscrit dans une stratégie visant à optimiser les coûts de production et à tirer parti des avantages logistiques et économiques offerts par le Maroc.

Stellantis prévoit d'augmenter la capacité de production de son usine de Kénitra, passant de 200 000 à 450 000 véhicules annuels, grâce à un investissement de 300 millions d'euros. Ce transfert est facilité par l'implantation de la plateforme multi-énergie « Smart », dédiée à la fabrication de véhicules électriques et hybrides. Actuellement, Kénitra produit déjà des modèles tels que le Citroën Ami, l’Opel Rocks et le Peugeot 208, renforçant ainsi son rôle clé dans la stratégie globale de Stellantis.

L’Espagne Face à un Défi Compétitif

En Espagne, la perspective de ce transfert est perçue comme une menace pour l'industrie automobile nationale, un pilier économique essentiel. L'usine de Villaverde, qui a récemment retrouvé un certain dynamisme grâce à la production du Citroën C4, pourrait voir son volume de production annuel diminuer, passant de 105 000 unités en 2022 à une estimation de 80 000 à 90 000 cette année. Cette contraction accentue les défis existants, tels que les coûts énergétiques élevés et les incertitudes liées à la transition vers l'électrification.

Selon des sources locales, le média espagnol El Debate, le Maroc se positionne comme un concurrent redoutable en combinant des coûts de production réduits avec une politique industrielle proactive. Le Royaume ambitionne de dépasser la barre du million de véhicules produits annuellement d'ici 2027, contre environ 700 000 actuellement, grâce à des investissements massifs et à l'expansion de ses capacités industrielles.

Une Réorientation Globale de l’Industrie Automobile

Le transfert des chaînes de production vers le Maroc reflète une transformation plus large de l'industrie automobile mondiale, où l'optimisation des coûts et l'efficacité logistique sont devenues des facteurs déterminants. Si le Maroc bénéficie d'une croissance incontestable et d'un élan industriel, les pays européens, et notamment l'Espagne, doivent redoubler d'efforts pour maintenir leur compétitivité dans un marché en évolution rapide.

Face à cette reconfiguration, l'Espagne pourrait être amenée à repenser ses stratégies industrielles, en investissant davantage dans l'innovation, la formation et les technologies vertes, afin de rester un acteur clé dans le secteur automobile mondial.

Le Maroc, en renforçant sa compétitivité dans l'industrie automobile, redessine les équilibres économiques régionaux et internationaux. Cette dynamique impose aux voisins européens, et en particulier à l'Espagne, de s'adapter et d'innover pour préserver leur place dans ce secteur stratégique. L'avenir de l'industrie automobile pourrait bien dépendre de la capacité des acteurs européens à répondre à ces nouveaux défis compétitifs posés par le Royaume chérifien.