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Bank Al-Maghrib peaufine le marché secondaire des créances en suffrance : Une réforme cruciale pour la banque et l’économie Marocaine
Bank Al-Maghrib (BAM), la Banque centrale du Maroc, se prépare à lancer une réforme d’envergure avec la création d’un marché secondaire des créances en souffrance. Annoncée par Abderrahim Bouazza, directeur général de BAM, lors d’une conférence organisée avec la Société financière internationale (IFC) à Casablanca, cette initiative vise à assainir le secteur bancaire et à renforcer la liquidité des établissements de crédit, tout en allégeant les tensions financières pesant sur l’économie nationale.
Un marché secondaire pour fluidifier le système bancaire
Le projet de création du marché secondaire des créances en souffrance a pour objectif de lever les obstacles juridiques actuels qui compliquent la cession de ces créances. Parmi les principales modifications apportées par cette réforme, la suppression de l'exigence de consentement du débiteur et la simplification des modalités de notification des avis de recouvrement constituent des avancées majeures. Ces changements visent à faciliter le transfert direct des créances, réduisant ainsi le fardeau sur les institutions financières.
Actuellement, les créances en souffrance représentent une part significative du bilan des banques marocaines. Avec un encours dépassant les 98 milliards de dirhams (soit environ 8,6% du total des crédits bancaires et presque 7% du PIB), elles sont devenues un fardeau pour de nombreuses institutions. Selon BAM, cette situation s’explique par la conjoncture économique difficile, des problèmes sectoriels et un phénomène de surendettement. De plus, l'impact des récentes crises économiques pourrait aggraver cette situation, sans que les effets ne soient pleinement visibles dans les bilans des banques.
Les défis du recouvrement
Les créances en souffrance ont tendance à rester inscrites aux bilans bancaires pendant des périodes prolongées, souvent en raison des délais nécessaires au recouvrement, qu'il soit amiable ou judiciaire. Selon les règles fiscales actuelles, elles doivent être conservées en bilan pendant au moins cinq ans après l’épuisement de toutes les voies de recours. Cela représente un défi majeur pour les banques, car ces créances immobilisent des fonds qui pourraient autrement être utilisés pour soutenir des projets productifs ou renforcer la solvabilité des institutions.
Les coûts liés à la gestion de ces créances sont également considérables. Elles génèrent des charges opérationnelles élevées et contribuent à un déficit de liquidité, estimé à environ 120 milliards de dirhams. Ce déficit est actuellement comblé par BAM, mais la réforme pourrait réduire cet écart en facilitant la vente de créances en souffrance sur un marché secondaire bien structuré.
Une réforme inclusivement concertée
Le processus de réforme a été piloté par un comité inter-institutionnel, réunissant divers acteurs gouvernementaux et judiciaires, sous l’égide du Secrétariat Général du Gouvernement. Cette approche inclusive a permis d’ajuster le projet aux réalités du marché bancaire marocain tout en anticipant les défis opérationnels. De plus, un large dialogue avec le secteur bancaire a été mené pour s’assurer que les intérêts de toutes les parties prenantes sont pris en compte.
L’un des objectifs clés de cette réforme est d’instaurer un marché secondaire des créances en souffrance transparent et efficace. En permettant aux établissements financiers de céder leurs créances en souffrance en toute sécurité, BAM espère améliorer la liquidité et réduire les risques financiers. À terme, cette mesure pourrait également renforcer la stabilité du secteur bancaire et soutenir la croissance économique du pays.
Le projet de marché secondaire des créances en souffrance représente une avancée importante pour le secteur bancaire marocain, en offrant une solution structurée et efficace face à un problème de taille. Si les défis restent nombreux, la réforme lancée par Bank Al-Maghrib pourrait bien constituer un tournant majeur dans la gestion des créances impayées au Maroc, en contribuant à une plus grande transparence, à une meilleure liquidité des banques et, in fine, à la stabilité de l'économie nationale.
Cette initiative marque une étape importante dans la modernisation du secteur bancaire marocain, avec des perspectives d'avenir qui pourraient en faire un modèle pour d'autres pays de la région.