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Cryptomonnaies : pourquoi le Maroc reste à la traîne du boom africain

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Cryptomonnaies : pourquoi le Maroc reste à la traîne du boom africain
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Alors que le continent africain attire des milliards de dollars dans le secteur des cryptomonnaies et des technologies blockchain, le Maroc semble demeurer spectateur d’une révolution numérique mondiale. Selon le rapport 2024 de Crypto Valley’s Blockchain VC (CVVC), le Royaume ne capte qu’un timide 1 % des investissements blockchain sur le continent. Une proportion qui révèle un retard préoccupant pour un pays souvent perçu comme moteur de développement en Afrique du Nord.

Pour Badr Balaj, ingénieur et expert en technologies numériques, ce chiffre ne traduit pas une dynamique nationale. « Le Maroc n’a connu aucun investissement notable dans ce domaine jusqu’en 2024. Le seul cas recensé est celui d’une startup locale ayant levé un million de dollars, sans même intégrer la blockchain dans son fonctionnement actuel », souligne-t-il. Ce financement isolé, obtenu par des canaux traditionnels, illustre un intérêt naissant mais fragile.

Le diagnostic posé par l’expert est sans équivoque : le flou réglementaire décourage les investisseurs étrangers, à la recherche de stabilité juridique. « Tant que le Maroc n’instaurera pas un cadre légal clair, il restera en marge des flux financiers mondiaux liés à la blockchain », affirme Balaj. À cette absence de réglementation s’ajoute une pénurie d’acteurs locaux : les jeunes startups spécialisées peinent à émerger dans un environnement incertain, et plusieurs entrepreneurs marocains préfèrent s’installer dans des écosystèmes plus accueillants comme Dubaï ou Istanbul.

Une occasion manquée ? Probablement. Le Maroc, fort de son capital humain et de son ambition digitale, aurait pu se positionner comme hub régional. Mais faute de dispositifs incitatifs, les investisseurs se sont tournés ailleurs. Les Seychelles, par exemple, ont réussi à capter près de 30 % des investissements africains grâce à une réglementation agile et des avantages fiscaux attractifs.

Bank Al-Maghrib semble toutefois vouloir inverser la tendance. En janvier 2025, son gouverneur Abdellatif Jouahri a annoncé l’élaboration d’un cadre législatif sur les cryptoactifs. L’objectif : encadrer l’usage des cryptomonnaies, assurer la protection des investisseurs et prévenir les risques financiers. Inspiré des modèles suédois, suisses et français, le projet entend clarifier le statut des cryptomonnaies au Maroc et mettre en place des mécanismes de lutte contre le blanchiment et le financement illicite.

Parallèlement, BAM explore une piste innovante : le lancement potentiel d’une monnaie numérique de banque centrale (MNBC). Contrairement aux cryptos décentralisées, une MNBC serait adossée au dirham et contrôlée par l’institution centrale. Une initiative qui vise à moderniser le système de paiement et à promouvoir l’inclusion financière.

Mais pour que le Maroc rattrape son retard, la volonté politique ne suffira pas. Il faudra un écosystème complet : un cadre fiscal favorable, des incubateurs dédiés, des fonds d’investissement spécialisés et surtout, une vision claire. « Si le pays veut créer des licornes dans le domaine de la blockchain, il doit agir maintenant », conclut Badr Balaj. Dans un monde où la technologie redessine les économies, l’immobilisme coûte cher.



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