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Banlieue parisienne : la police municipale s’arme
La question de l’armement des polices municipales s’impose aujourd’hui comme un enjeu majeur de la sécurité locale, notamment en banlieue parisienne, où plusieurs communes ont franchi le pas malgré des controverses politiques persistantes.
Longtemps cantonnée à des missions de proximité ou à des fonctions administratives, la police municipale connaît une profonde mutation. En première ligne sur le terrain, elle est de plus en plus souvent dotée d’armes létales. À Cergy, dans le Val-d’Oise, cette transformation s’est accélérée dès 2022, quand le maire socialiste Jean-Paul Jeandon a dû faire face à un paradoxe : aucune candidature pour une brigade de nuit non armée. C’est seulement après avoir autorisé le port d’armes que la ville a pu constituer une équipe fonctionnelle. Résultat : l’armement est désormais généralisé en journée également, à la demande des agents eux-mêmes.
Jean-Paul Jeandon confesse un revirement idéologique motivé par la montée des incivilités : « Pendant vingt ans, je pensais que l’armement n’était pas nécessaire. Mais aujourd’hui, c’est une question de sécurité pour nos agents. » Une logique sécuritaire qui dépasse les clivages politiques.
À Saint-Denis, bastion historique de la gauche radicale, le maire socialiste Mathieu Hanotin a fait de l’armement de la police municipale l’un des axes forts de son programme. Depuis son arrivée en 2020, les effectifs ont triplé, la vidéosurveillance s’est multipliée, et les missions de la police municipale se sont élargies à une présence 24h/24. Face aux critiques de la France Insoumise, Hanotin réplique : « Ne pas armer, c’est nier les réalités du terrain. » Pour lui, chaque maire doit pouvoir décider librement.
Cette position n’est pas isolée. Selon un rapport sénatorial de mai 2024, 80 % des policiers municipaux en France sont désormais armés, une proportion restée stable depuis plusieurs années, malgré l’augmentation significative du nombre d’agents : de 15.765 en 2012 à 21.772 en 2023.
À Aubervilliers, ville populaire du nord de Paris, la maire centriste Karine Franclet justifie son choix de renforcer les effectifs et l’armement par une demande forte des habitants. L’objectif ? « Être dissuasif, pas militarisé », insiste-t-elle. Pourtant, deux cas d’usage de l’arme ont marqué les esprits, notamment celui de juin 2024, où un sans-abri a été tué après avoir agressé un agent au tournevis. Un drame qui illustre toute la complexité d’une telle politique.
La polémique a récemment été ravivée par la députée LFI Mathilde Panot, qui déclarait sur BFM TV : « Une police municipale de proximité n’a pas besoin d’être armée. » Une phrase qui a suscité de vives réactions et relancé un débat déjà très tendu.
Alors que les maires des banlieues franciliennes cherchent des réponses concrètes face à une insécurité perçue comme croissante, l’armement des polices municipales ne cesse de s’imposer comme un outil incontournable — au risque de diviser profondément la classe politique et la population.