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Élections en Tunisie : l’illusion démocratique à l’épreuve
À l'approche des élections en Tunisie, prévues dans seulement trois jours, le pays semble replonger dans une atmosphère de scepticisme. Ce petit laboratoire postrévolutionnaire du Maghreb, qui avait connu un élan démocratique après la révolution de Jasmin en 2011, fait face à un désenchantement grandissant. En ce moment crucial, une question prédomine : ces élections apporteront-elles un réel changement ?
Une démocratie en quête de sens
Depuis 2011, les Tunisiens ont goûté à une liberté d'expression, rare dans le monde arabe. Cependant, cette avancée n'a pas été accompagnée d'améliorations significatives en matière de progrès social et économique. Les élections de 2024 ne constituent pas seulement une nouvelle échéance électorale ; elles incarnent une quête désespérée d'oxygène pour une démocratie étouffée par des conflits internes et une économie en crise. La récente dérive autoritaire du président Kaïs Saïed, qui a consolidé ses pouvoirs, laisse peu de place à un véritable choix démocratique pour le peuple tunisien.
Élu en 2019, le président, ancien professeur de droit constitutionnel, a provoqué une onde de choc au sein des institutions tunisiennes. En dissolvant le Parlement en 2021 et en modifiant la Constitution à son avantage, il a non seulement renforcé son emprise, mais aussi suscité des critiques concernant son autoritarisme. Si la démocratie tunisienne n’a jamais été un modèle de stabilité, l’évolution vers un système présidentiel fort représente un tournant aussi inattendu que périlleux.
La personnalité de Saïed au centre des débats
À J-3, les discussions se concentrent moins sur des réformes économiques concrètes que sur la personnalité du président Saïed, qui navigue entre légitimité et contestation. Ses opposants parlent de dérive autoritaire, et même certains de ses partisans commencent à ressentir une méfiance croissante. À l’approche des élections, la question n’est plus seulement de savoir qui dirigera le pays, mais plutôt dans quel cadre institutionnel ce gouvernement évoluera.
La société civile, qui avait joué un rôle crucial lors de la transition démocratique, semble aujourd’hui réduite à un simple spectateur de la situation politique. Quant à l'opposition, elle se montre divisée et incapable de rassembler des forces autour d'un programme alternatif crédible.
Les préoccupations économiques comme toile de fond
Derrière ces enjeux politiques se cache une question économique cruciale. Le citoyen tunisien, de plus en plus préoccupé par la montée des prix et le chômage élevé, aborde cette campagne électorale avec lassitude. La chute du pouvoir d'achat et l'inflation qui grignote le quotidien font que beaucoup doutent de l'impact de ces élections.
Le FMI, qui surveille attentivement la situation, conditionne son aide à la mise en place de réformes. Pourtant, le président Saïed, fidèle à son discours populiste, semble réticent à accepter ces exigences, créant ainsi une tension entre les pressions internationales et un peuple qui rejette les mesures d’austérité.
Le spectre de l’abstention
À trois jours du scrutin, le spectre de l'abstention plane sur la scène politique. Les taux de participation des précédentes élections étant déjà préoccupants, cette fois-ci, le phénomène pourrait atteindre des sommets. Le désenchantement est tel que même les fervents défenseurs de la démocratie s’interrogent sur l’intérêt de cette élection.
Le discours populiste de Saïed, qui avait séduit lors de son élection, semble perdre de sa vigueur, laissant place à une apathie politique qui pourrait bien enterrer le rêve démocratique tunisien.
Des enjeux incertains
La Tunisie se trouve à un carrefour délicat. À J-3 des élections, l'atmosphère est tout sauf festive. Les enjeux sont cruciaux, mais l'environnement politique paraît délétère. Kaïs Saïed, à travers ses décisions controversées, a positionné le pays dans une zone grise, oscillant entre démocratie fragile et dérive autoritaire.
Si le peuple ne se mobilise pas et si l’opposition échoue à créer un élan de changement, ces élections pourraient se révéler être un épisode de plus dans un feuilleton politique interminable, où les Tunisiens demeurent des spectateurs désemparés de leur propre histoire. La question demeure : la Tunisie peut-elle encore croire en ses élections, ou est-elle condamnée à répéter les erreurs du passé, tout en espérant des résultats différents ?