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Maroc-Allemagne : vers un nouveau pacte migratoire équitable et durable

Hier 21:03
Maroc-Allemagne : vers un nouveau pacte migratoire équitable et durable
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Depuis les années 1960, le Maroc et l’Allemagne partagent une histoire migratoire singulière, forgée à la croisée de besoins économiques et de logiques postcoloniales. Ce passé, longtemps fondé sur des accords bilatéraux de main-d’œuvre, a permis à des milliers de Marocains d'intégrer le tissu productif allemand, contribuant de manière significative à son miracle économique. Aujourd’hui, le contexte a changé, mais la complémentarité demeure. Un nouveau pacte migratoire, équitable et structuré, s’impose.

Un héritage solide, des défis contemporains

Dans l’Allemagne d’après-guerre, la pénurie de main-d’œuvre industrielle était un frein à la croissance. Le Maroc, de son côté, faisait face à un chômage structurel massif après l’indépendance. Les accords migratoires signés à partir des années 1960 ont permis de répondre à ces deux impératifs, envoyant des travailleurs marocains dans les mines, la sidérurgie ou l’agriculture. Encadrés par des structures institutionnelles et soutenus par des organisations locales comme l’Union des femmes marocaines, ces flux migratoires ont marqué une coopération humaine inédite.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : selon le ministère allemand de l’Économie (BMWK), entre 1960 et 1980, les travailleurs immigrés ont largement contribué au doublement du PIB allemand.

2025 : une nouvelle donne géopolitique et sociale

Aujourd’hui, le Maroc dispose d’un capital humain jeune, éduqué et ambitieux : plus de 40 000 diplômé·e·s sortent chaque année des universités et établissements techniques du pays. Le gouvernement vise la création de deux millions d’emplois d’ici 2026, mais cette ambition se heurte à une conjoncture internationale complexe et à des ressources limitées.

De son côté, l’Allemagne fait face à une transition démographique sans précédent. Plus de 12 millions de baby-boomers prendront leur retraite d’ici 2035, créant une pression intense sur le marché du travail. Déjà, 1,7 million de postes sont vacants, notamment dans les secteurs des soins, du numérique, de l’éducation et de l’artisanat.

La nécessité d’un cadre nouveau : l’Agence binationale de la mobilité

Si certaines initiatives comme le programme THAMM (mis en œuvre par la GIZ) montrent la voie, elles restent ponctuelles, limitées dans leur portée et leur durée. Un pacte global, pérenne et structuré est nécessaire. Celui-ci devrait reposer sur une Agence binationale pour la mobilité et les compétences, outil de pilotage et de confiance mutuelle.

Cette agence aurait pour missions :

  • d’identifier les secteurs à forte demande dans les deux pays,
  • de développer des formations professionnelles conjointes,
  • d’organiser des cours de langue et des modules d’intégration,
  • de garantir les droits sociaux des travailleurs selon les standards de l’OIT,
  • et de favoriser la réinsertion au Maroc pour les retours volontaires.

Ce cadre garantirait une migration choisie, encadrée, loin des logiques de fuite des cerveaux, mais proche d’une logique de circulation des savoirs et des compétences.

Un modèle pour la Méditerranée de demain

Comme le rappelle Dr Soraya Moket, sociologue et experte des dynamiques migratoires : « La migration ne doit plus être pensée comme une urgence à gérer, mais comme un levier stratégique de coopération Nord-Sud ». Son engagement, reconnu par la Croix fédérale du Mérite en 2016, incarne cette vision d’un partenariat basé sur la reconnaissance, la solidarité et la justice sociale.

En se tournant vers l’avenir, le Maroc et l’Allemagne ont l’opportunité de poser les bases d’un modèle migratoire responsable, équitable et reproductible ailleurs. Un modèle dans lequel la migration devient un outil de développement partagé, et non une réponse conjoncturelle à des besoins sectoriels.

Dans un monde en mutation, marqué par les tensions géopolitiques et les défis économiques, le temps est venu pour le Maroc et l’Allemagne de réinventer leur coopération migratoire. Ce nouveau pacte, fondé sur l’éthique, la co-construction et l’intérêt mutuel, pourrait bien devenir un modèle inspirant pour toute la région euro-méditerranéenne.

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