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Maroc – Espagne : la mécanique du succès marocain défie l’automobile ibérique
Longtemps considérée comme une puissance industrielle régionale, l’Espagne voit aujourd’hui émerger un rival de taille sur son flanc sud : le Maroc. En l’espace de quelques années, le royaume chérifien a su se hisser au rang d’acteur incontournable dans les secteurs de l’automobile et de la réparation mécanique, au point de concurrencer directement son voisin européen.
Des ateliers marocains pris d’assaut par les Espagnols
Ce qui aurait pu paraître anecdotique est devenu une tendance lourde : de plus en plus d’automobilistes espagnols traversent le détroit de Gibraltar pour faire réparer leurs véhicules à Tanger ou Kénitra. En cause, un coût de la main-d’œuvre défiant toute concurrence : environ 2 euros de l’heure dans les garages marocains, contre 100 à 150 euros en Espagne. Résultat, une révision complète avec pièces d’origine coûte souvent moins de 1 000 euros, tandis qu’une peinture intégrale ne dépasse pas 500 euros.
Même en ajoutant les 200 euros de ferry aller-retour entre Tarifa et Tanger, l’opération reste avantageuse, notamment pour les familles ou les entreprises possédant plusieurs véhicules. De quoi transformer les rives marocaines du détroit en un véritable eldorado de la mécanique low-cost pour les Européens du Sud.
Une industrie automobile en plein essor
Cette dynamique ne se limite pas aux ateliers de réparation. Le secteur automobile marocain connaît une croissance spectaculaire : avec une hausse de production de 29 % entre 2021 et 2025, le pays s’impose comme le champion mondial de la progression dans ce domaine. En 2023, les exportations de véhicules marocains vers l’Union européenne ont atteint 15,1 milliards d’euros, en hausse de 30 % par rapport à l’année précédente.
À la mi-2025, 350 000 véhicules avaient été produits, un record qui traduit la vitalité du secteur. L’automobile représente désormais plus de 10,4 % du PIB marocain et un quart des exportations nationales. Des géants comme Renault-Nissan, Stellantis ou encore BYD ont massivement investi dans des sites modernes, à Casablanca, Tanger et surtout Kénitra.
Des coûts imbattables, une attractivité renforcée
Ce succès repose en grande partie sur un facteur clé : la compétitivité des coûts. D’après le cabinet Oliver Wyman, le coût salarial moyen par véhicule s’élève à 106 dollars au Maroc, contre 3 307 dollars en Allemagne. Ce différentiel de plus de trente fois séduit les multinationales qui cherchent à optimiser leurs chaînes de production face à des normes européennes toujours plus strictes.
Bruxelles hausse le ton
Mais cette montée en puissance commence à inquiéter Bruxelles. En avril 2025, l’Union européenne a instauré des droits compensateurs allant jusqu’à 31,4 % sur les roues en aluminium importées du Maroc, accusant Rabat de pratiques de subvention contraires aux règles du marché. Une décision qui pourrait annoncer des mesures plus larges ciblant le secteur automobile dans son ensemble.
Une stratégie industrielle marocaine bien huilée
Cette réussite n’est pas le fruit du hasard. Le Maroc a su bâtir une stratégie industrielle cohérente, combinant zones franches performantes, port Tanger-Med à la pointe, et incitations fiscales ciblées. La politique d’intégration locale et de transfert technologique, couplée à des investissements dans la recherche-développement, a permis au pays de monter en gamme et de gagner en autonomie.
D’après le média espagnol El Debate, Stellantis prévoit même de délocaliser la production de la Citroën C4 de Madrid à Kénitra dès 2027, symbole fort d’un changement de paradigme industriel au sein de l’espace euro-méditerranéen.
L’Espagne sommée de réagir
Face à cette montée en puissance, l’Espagne se trouve dans une position délicate. Le pays, longtemps leader en Europe du Sud dans le domaine automobile, voit son écosystème fragilisé. Les services mécaniques, désormais concurrencés jusqu’au cœur même de la péninsule, ne peuvent plus compter uniquement sur leur proximité géographique pour conserver leur clientèle.
Le Maroc, une puissance industrielle affirmée
Le Maroc n’est plus un simple pays de sous-traitance. Il est devenu une plateforme industrielle autonome, exportatrice de savoir-faire et créatrice d’emplois qualifiés. En capitalisant sur sa main-d’œuvre compétitive, ses infrastructures modernes et sa politique industrielle proactive, le royaume a su transformer des défis en opportunités.
L’Espagne, de son côté, devra revoir ses cartes pour rester dans la course. Car ce qui a commencé comme une échappatoire économique pour quelques automobilistes est désormais une révolution industrielle méditerranéenne.