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Mobilité et visas : l’Afrique entre restrictions croissantes et réinvention numérique
À l’heure où la mobilité internationale devient un enjeu stratégique, les ressortissants africains font face à un paradoxe saisissant : d’un côté, un durcissement visible des politiques de visas dans les grandes puissances du Nord ; de l’autre, une lente transformation numérique initiée sur le continent. C’est ce que révèle le dernier rapport de la start-up canadienne Sherpa, qui passe en revue les mises à jour mondiales sur les visas à la fin juin 2025. Une lecture géopolitique s’impose.
Trump et la nouvelle vague d’exclusion américaine
Le retour sur la scène politique de Donald Trump n’a pas tardé à impacter la politique migratoire américaine. Le 9 juin 2025, l’ancien président annonce des restrictions de visa envers 10 pays africains, dont une suspension totale pour sept d’entre eux (Libye, Soudan, Érythrée, Tchad...) et des restrictions partielles pour les trois autres. Sont pointés du doigt les taux de dépassement de séjour élevés, des défaillances administratives, et un manque de coopération dans les procédures de réadmission.
Mais au-delà du vernis technique, la décision apparaît comme une instrumentalisation sécuritaire d’un enjeu diplomatique, ciblant des pays à faible pouvoir de négociation. Les catégories de visas affectées (B1/B2, F, J...) concernent principalement les touristes, étudiants et chercheurs, limitant ainsi les opportunités de mobilité intellectuelle et économique.
Asie et Moyen-Orient : ouverture sélective et hiérarchie implicite
En Asie, la Chine poursuit sa stratégie de mobilité différenciée. Son programme de transit sans visa étendu à l’Indonésie exclut toujours la quasi-totalité du continent africain, à l’exception notable de Maurice et des Seychelles. Une inclusion marginale qui confirme une hiérarchie implicite des passeports en fonction de leur valeur économique perçue.
L’Arabie saoudite, de son côté, étend son eVisa touristique, mais seulement à trois pays africains. Le reste du continent est renvoyé vers des démarches consulaires lourdes et peu transparentes. La récente ouverture à l’Asie centrale (Tadjikistan, Ouzbékistan) montre une stratégie de ciblage de marchés jugés stratégiques au détriment de l’Afrique.
Des initiatives africaines en gestation
Face à ces barrières croissantes, plusieurs États africains cherchent à se positionner différemment, misant sur la digitalisation des procédures de visas.
En Afrique du Sud, le lancement en septembre 2025 d’un système ETA (Electronic Travel Authorisation), piloté par le ministre Léon Schreiber, incarne une volonté de moderniser l’administration via l’intelligence artificielle. L’objectif : réduire la fraude, fluidifier les procédures, et renforcer la sécurité nationale tout en attirant les visiteurs.
L’Égypte, quant à elle, expérimente un e-visa d’urgence à l’aéroport du Caire, délivré via des bornes numériques et une application mobile. Ce dispositif, conçu pour doper l’attractivité touristique, marque un tournant vers une plus grande réactivité administrative.
Au Mozambique, l’introduction d’un système d’AVE (autorisation de voyage électronique) en mai 2025 a tourné court. L’initiative, bien qu’innovante, a été suspendue dix jours après son lancement, en raison de failles techniques. Une déconvenue révélatrice des fragilités numériques qui freinent encore la souveraineté technologique de nombreux pays africains.
L’Europe : vers un contrôle algorithmique des frontières
L’Union européenne n’est pas en reste. Prévu pour octobre 2025, le Système d’Entrée/Sortie (EES) marquera un changement profond dans la gestion des flux migratoires. Sous couvert de simplification via une application mobile, le dispositif vise en réalité une surveillance accrue des entrées et sorties, à l’aide de données biométriques et d’algorithmes prédictifs. Un modèle qui, une fois déployé, pourrait accentuer les difficultés des voyageurs africains, notamment ceux disposant de passeports faiblement classés dans les index de mobilité.
Une souveraineté à reconquérir
Le panorama mondial dressé par Sherpa souligne une évidence : la mobilité internationale est plus politique que technique. En 2025, les ressortissants africains restent globalement pénalisés par un système de visas asymétrique, reflet d’un monde où la circulation est un privilège.
Pour autant, les efforts de digitalisation menés localement, bien qu’inégaux, montrent qu’une autre voie est possible. Une voie qui passe par la montée en puissance des États africains dans la gouvernance de leurs frontières numériques, et dans la redéfinition des partenariats migratoires, plus équilibrés et respectueux.
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