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Casablanca : le Souk Dallas démoli, les commerçants entre colère et incertitude

Casablanca : le Souk Dallas démoli, les commerçants entre colère et incertitude
18:35 Par: Naji khaoula
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Une page se tourne à Hay Hassani. Le célèbre Souk Dallas, marché informel emblématique du quartier, est en train d’être démoli dans le cadre d’une vaste opération de libération de l’espace public. Depuis le début de la semaine, bulldozers et équipes de la voirie s’activent sur le site, entraînant avec eux les espoirs et les moyens de subsistance de centaines de commerçants.

Sur place, le contraste est saisissant. D’un côté, les autorités locales défendent une action nécessaire, motivée par les plaintes répétées des riverains dénonçant l’encombrement, le désordre et l’insécurité aux abords du marché. De l’autre, des commerçants abasourdis dénoncent une démolition brutale, menée sans véritable concertation ni solution alternative concrète.

« Nous sommes là depuis 1987, il y a 943 magasins. Ce marché, c’est notre vie. Nous avons toujours demandé une solution durable », explique Ibrahim Zrik, président de la Fédération de la ferraille du Souk Dallas.

Selon lui, des discussions avaient été engagées avec la commune de Casablanca en vue d’un relogement vers un terrain situé près de l’ancienne décharge de Médiouna. Un projet d’aménagement qui aurait permis aux différents corps de métier du marché – ferrailleurs, vendeurs de vêtements d’occasion, primeurs, bouchers ou encore quincailliers – de poursuivre leur activité dans un cadre plus réglementé.

« Nous avons accepté le principe du transfert, comme cela s’est fait à Sbata ou Sidi Moumen. Mais ici, on commence à détruire sans nous présenter de solution concrète. C’est incompréhensible », poursuit M. Zrik.

Un sentiment partagé par Mohamed Achak, représentant des commerçants :

« On nous parlait de nettoyage du marché. On a même salué cette initiative. Mais ce matin, ce sont des bulldozers qui sont arrivés. Nous avons été pris de court. »

Malgré le respect affiché envers les autorités locales, les professionnels du Souk Dallas dénoncent une approche qu’ils jugent précipitée et injuste. Tous insistent sur un même point : ils ne s’opposent pas à l’organisation du secteur, mais demandent un véritable dialogue et des garanties de relogement.

« Ce marché nourrit des centaines de familles. On ne peut pas tout raser sans plan clair. Ce n’est pas juste », martèle M. Achak.

Le Souk Dallas n’est pas un simple regroupement de baraques de fortune. C’est un écosystème économique vieux de plus de quarante ans, avec ses habitudes, ses codes et ses solidarités. Pour nombre de Casablancais, il incarne à la fois le dynamisme du secteur informel et les limites d’un urbanisme non maîtrisé.

Alors que les pelleteuses poursuivent leur œuvre, le fossé semble se creuser entre les autorités et les commerçants. Ces derniers réclament aujourd’hui une solution digne, concertée et équitable, avant qu’il ne soit trop tard.

La démolition du Souk Dallas illustre une tension croissante entre les impératifs d’aménagement urbain et la réalité sociale de milliers de travailleurs du secteur informel. Si la libération de l’espace public est un objectif légitime, sa mise en œuvre sans relogement planifié risque de créer une précarité encore plus grande. À Casablanca, les gravats ne sont peut-être que les premiers signes d’une crise sociale en devenir.

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