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"La concurrence est la force vitale qui anime l’être collectif…"
Chaque année, à l’approche du Ramadan, la même scène se répète : les prix de certains produits de consommation s’envolent. Fruits, légumes, viandes, poissons… Tout devient soudainement plus cher, au grand désarroi des consommateurs. Pourtant, à l’autre bout de la chaîne, les producteurs – agriculteurs et pêcheurs – cèdent leurs produits à des prix dérisoires. Où disparaît alors la valeur ajoutée entre le producteur et le consommateur ?
L’histoire récente de "Moul Sardine" apporte un éclairage saisissant. En vendant ses sardines à 5 dirhams le kilo, ce poissonnier de Marrakech a mis en lumière une réalité bien connue mais rarement formulée : le problème ne vient ni de la rareté du produit ni de la loi de l’offre et de la demande, mais bien des marges excessives imposées par les intermédiaires. Son initiative a été perçue comme une remise en cause d’un fonctionnement établi. Rapidement, il a subi des pressions et son commerce a fermé. Mais face à sa viralité et à l’ampleur des réactions sur les réseaux sociaux, il a pu reprendre son activité.
Loin d’être un simple jeu de marché, la concurrence est un moteur du progrès. Pierre-Joseph Proudhon, penseur du XIXe siècle, y voyait une condition essentielle à l’équilibre économique et social. Contrairement aux critiques radicales du capitalisme, il ne la voyait pas comme une force destructrice, mais comme un mécanisme naturel qui empêche la concentration du pouvoir économique entre quelques mains.
« La concurrence est la force vitale qui anime l’être collectif : la détruire, ce serait tuer la société. »
Pour lui, supprimer la concurrence reviendrait à instaurer un monopole ou un oligopole, limitant l’innovation, restreignant l’accès aux biens et services. Toutefois, il mettait aussi en garde contre une concurrence sauvage, qui, en l’absence de règles, profiterait uniquement aux plus puissants. L’enjeu n’est donc pas de déréguler, mais de trouver un équilibre : assurer aux producteurs une rémunération juste tout en garantissant aux consommateurs un prix raisonnable.
Si l’on suit Adam Smith, père du libéralisme économique, la motivation première des producteurs n’est pas la philanthropie, mais leur propre intérêt :
« Ce n’est pas de la bienveillance du boucher, du brasseur ou du boulanger que nous attendons notre dîner, mais de leur souci de leur propre intérêt. »
Cette citation rappelle une vérité fondamentale : le commerce fonctionne lorsque l’intérêt individuel des producteurs sert l’intérêt collectif des consommateurs. Mais lorsque cet équilibre est faussé par des pratiques spéculatives outrancière et des intermédiaires omniprésents c’est toute la dynamique du marché qui s’effondre.
C’est précisément ce que montre le cas de "Moul Sardine" : le poisson n’est pas rare, mais les marges successives appliquées tout au long de la chaîne de distribution le rendent artificiellement cher. Ce ne sont plus les mécanismes naturels du marché qui dictent les prix, mais la structure même des marges spéculatives.
Baisser les prix ne doit pas être une finalité en soi. Comme le souligne Michael Porter :
« La concurrence sur le prix est la stratégie la moins durable. »
À court terme, une concurrence sur les prix peut profiter aux consommateurs. Mais à long terme, elle risque de fragiliser les producteurs, d’appauvrir l’offre et de nuire à la qualité des produits et services. Le véritable défi réside ailleurs : garantir un prix juste, qui rémunère équitablement le travail et minimise la part de la spéculation. Cela passe par une régulation intelligente, qui favorise la compétitivité sans fausser le jeu du marché.
Le cas de "Moul Sardine" n’est pas un simple fait divers, c’est le signal d’un phénomène plus large. Son initiative a inspiré d’autres commerçants à travers le pays, et déjà, des expériences similaires émergent dans plusieurs villes. Ce mouvement traduit une prise de conscience collective : la concurrence n’est pas un luxe, c’est une nécessité pour garantir une justice économique.
Mais comme tant d’autres figures avant lui, "Moul Sardine" restera-t-il un symbole durable ou sera-t-il rapidement éclipsé par l’oubli des réseaux sociaux et la pression du marché ? L’avenir de ces nouvelles initiatives dépendra de leur capacité à s’inscrire dans la durée et à trouver un équilibre entre accessibilité des prix et pérennité économique.
Les réseaux sociaux font et défont les figures du quotidien. Certains exposent les failles du système, d’autres tentent d’en profiter. Beaucoup disparaissent aussi vite qu’ils sont apparus. D’autres, en revanche, changent la donne pour de bon.
La vague de "Moul Sardine" ne fait que commencer. Jusqu’où ira-t-elle ?
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