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Tunnel imaginaire, propagande bien réelle

Tunnel imaginaire, propagande bien réelle
09:00
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Une manipulation qui fait date. La télévision publique algérienne (ENTV) a récemment franchi un nouveau cap dans la désinformation en diffusant un reportage accusant le Maroc d’avoir construit un tunnel de contrebande à la frontière algérienne, dans la région de Tlemcen. Problème : les images utilisées ne proviennent nullement d’un site frontalier, mais d’un tunnel découvert en février 2024 par les autorités espagnoles… à Sebta.

Cette tentative flagrante de manipulation n’est pas passée inaperçue. L’ENTV, pilier de la communication officielle en Algérie, a détourné un extrait vidéo provenant d’un communiqué officiel de la Garde civile espagnole. Dans le montage diffusé, les logos des autorités espagnoles ont été soigneusement effacés, les uniformes floutés, et le contexte géographique totalement réécrit, suggérant l’existence d’un réseau criminel marocain opérant à la frontière algérienne.

Un "tunnel fantôme" devenu arme de propagande

Selon le récit livré par la chaîne algérienne, ce soi-disant tunnel relierait le Maroc à la localité de Bab El Assa, dans la wilaya de Tlemcen, et servirait au trafic de drogue et de marchandises. Le reportage, au ton alarmiste, évoque même une « complicité des autorités marocaines », sans avancer la moindre preuve tangible.

Or, la supercherie est rapidement mise à nu. Les images proviennent d’une opération baptisée Hadès, menée conjointement par la Garde civile espagnole et les forces marocaines dans la région de Tétouan, à proximité de l’enclave occupée de Sebta. L’enquête, désormais entre les mains de la Brigade nationale de la police judiciaire (BNPJ) marocaine, a confirmé l’existence d’une galerie souterraine utilisée pour le trafic illicite. Aucun lien, ni géographique ni opérationnel, avec l’Algérie.

Un appareil médiatique discrédité

Ce n’est pas la première fois que les médias proches du régime algérien sombrent dans l’exagération. Mais cette fois, le procédé utilisé — réutilisation d’images officielles d’un autre pays, modification du contenu, et mise en scène accusatoire — rappelle les méthodes de désinformation les plus grossières.

Plusieurs observateurs, journalistes et internautes ont dénoncé une tentative grotesque de détourner l’attention de la population algérienne. Pour le journaliste exilé Oualid Kébir, cette dérive relève de la farce d’État : « Un tunnel espagnol transformé en preuve d’un complot marocain… c’est de la fiction présentée comme information officielle. »

Une diversion aux accents de crise

Derrière ce montage, nombreux sont ceux qui voient une stratégie de diversion, visant à masquer les difficultés internes du régime algérien : inflation galopante, taux de chômage inquiétant, tensions sociales, et contestation politique. Face à ces défis, le recours à l’ennemi extérieur semble être devenu un outil de gouvernance.

Mais à force de pousser la propagande jusqu’à l’absurde, l’Algérie officielle risque de perdre ce qui lui reste de crédibilité sur la scène internationale. Cette affaire illustre, une fois de plus, la fragilité d’un système médiatique entièrement soumis aux impératifs politiques, prêt à falsifier l’information pour construire une réalité parallèle.

Conclusion : un faux pas révélateur

Ce que cette affaire révèle, au-delà de la manipulation elle-même, c’est le niveau de défiance qu’inspire désormais l’appareil médiatique algérien. En tentant de faire passer un fait étranger pour une menace nationale, l’ENTV ne fait que creuser davantage le fossé entre l’information et la propagande. Et dans ce tunnel de désinformation, c’est la vérité qui reste ensevelie.

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