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Le Brésil renonce à récompenser les policiers pour avoir tué des criminels
Le gouverneur de Rio de Janeiro, Claudio Castro, a annoncé jeudi qu’il censurait les dispositions d’une loi controversée qui proposait d’accorder une prime financière aux policiers ayant « neutralisé des criminels ». Cette mesure, qualifiée de « prime Far-West » par la presse brésilienne, avait suscité une vague d’indignation dans le pays.
Le texte, adopté en septembre par l’Assemblée législative de l’État de Rio (Alerj), prévoyait que les agents puissent toucher jusqu’à 150 % de leur salaire pour la saisie d’armes lourdes ou pour des opérations entraînant la mort de suspects. Le gouverneur a opposé son veto lors de la promulgation, empêchant son entrée en vigueur, même si l’Alerj peut encore tenter de rétablir la disposition par un nouveau vote.
Claudio Castro, allié de l’ancien président Jair Bolsonaro, a justifié sa décision par des raisons de « responsabilité budgétaire », estimant que le versement de ces primes aurait entraîné de nouvelles dépenses publiques. Mais pour le parquet de Rio, cette disposition allait bien au-delà d’un problème financier. Elle représentait une violation du principe constitutionnel du droit à la vie et risquait d’encourager les violences policières, déjà endémiques dans la ville.
Cette décision a été saluée par les organisations de défense des droits humains, qui y voient un geste de retenue politique dans un État où les interventions policières font régulièrement des victimes. « Récompenser les agents pour avoir tué revient à institutionnaliser la violence et à légitimer les exécutions sommaires », a dénoncé un collectif de juristes de Rio.
Depuis plusieurs décennies, la ville est confrontée à une violence policière chronique, en particulier dans les favelas, ces quartiers populaires contrôlés en partie par des réseaux de narcotrafiquants. En 2024, près de 700 personnes ont été tuées lors d’opérations menées par les forces de l’ordre à Rio, soit près de deux morts par jour, selon les données officielles. Plus de 86 % des victimes étaient noires.
La colère des familles de victimes a redoublé après l’adoption du texte initial par les députés. Devant le palais de Guanabara, siège du gouvernement, des mères endeuillées ont manifesté pour réclamer le retrait de la mesure. Parmi elles, Priscila Menezes, dont le fils Thiago, 13 ans, a été abattu par des policiers militaires en 2023 dans la Cité de Dieu. « Mon fils a été tué gratuitement. Ces policiers n’ont pas reçu d’argent pour le faire, et ils l’ont quand même fait. Imaginez s’ils commençaient à être payés pour tuer », a-t-elle déclaré, la voix brisée.
Cette « prime Far-West » n’est pas sans rappeler une politique similaire mise en place entre 1995 et 1998, à l’époque où une prime de performance était accordée aux policiers militaires pour chaque saisie d’armes ou arrestation. Cette mesure avait été rapidement abandonnée après une hausse spectaculaire des morts liées aux interventions policières.
La tentative de réintroduire une telle prime illustre les fractures profondes du Brésil face à la question sécuritaire. D’un côté, une partie de la classe politique continue de prôner une approche répressive pour répondre à la criminalité urbaine, tandis que d’autres défendent une refonte complète des pratiques policières, fondée sur la prévention et la formation.
En censurant cette disposition, Claudio Castro tente de désamorcer une crise politique et sociale, tout en préservant son image d’homme fort de la sécurité publique. Mais son geste ne suffit pas à éteindre le débat : dans les quartiers populaires de Rio, où les rafales de fusils d’assaut rythment encore le quotidien, beaucoup redoutent que la violence policière ne soit jamais véritablement remise en question.