Narcotrafic : une organisation reliant la Normandie à Casablanca neutralisée

Hier 21:25

Par: Naji khaoula

Narcotrafic : une organisation reliant la Normandie à Casablanca neutralisée

Après plus de trois années d’investigations judiciaires, un vaste dispositif criminel spécialisé dans l’importation de stupéfiants entre la France et le Maroc a été neutralisé. L’opération, révélée lundi par le parquet de Lille, a mis en lumière une organisation transnationale structurée, s’appuyant notamment sur plusieurs ports normands et sur une direction établie à Casablanca, avec la participation active de la police marocaine (DGSN).

Selon les autorités judiciaires, le réseau acheminait d’importantes quantités de cocaïne et de cannabis par voie maritime, en utilisant les installations portuaires du Havre, de Moulineaux, dans la métropole rouennaise, ainsi que de Dunkerque. À l’issue de cette enquête d’envergure, le principal organisateur présumé, identifié comme le chef du réseau, a été interpellé au Maroc avant d’être remis aux autorités françaises en septembre dernier.

Une organisation hiérarchisée et bien implantée

L’information judiciaire a été ouverte au printemps 2022, à la suite de premiers éléments recueillis à Rouen par la division de la criminalité organisée et spécialisée (DCOS) du service interdépartemental de la police judiciaire. Très vite, les enquêteurs constatent que les faits dépassent le cadre local, ce qui conduit la juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Lille à reprendre le dossier.

Les investigations révèlent progressivement l’existence d’un noyau dur de trafiquants implantés dans la région rouennaise. Ces derniers bénéficiaient de complicités dans les milieux portuaires, notamment parmi certains dockers, chargés de fournir des informations sensibles sur les mouvements de conteneurs. Les stupéfiants étaient dissimulés dans des cargaisons commerciales ou récupérés en mer selon la technique dite du « largage », consistant à jeter les ballots à l’eau avant leur récupération.

Des saisies massives et des interpellations ciblées

Les premières saisies majeures interviennent en juin 2023, avec la découverte de 183 kilogrammes de cocaïne dans un conteneur arrivé au port du Havre. Quelques mois plus tard, près de 400 kilogrammes supplémentaires sont repérés après un largage en mer, suivis d’une nouvelle opération permettant d’identifier environ une tonne de cocaïne au large des côtes normandes.

En décembre 2023, une perquisition aboutit également à la saisie de 23 kilogrammes de résine de cannabis. Neuf personnes sont alors interpellées et mises en examen. Six d’entre elles sont placées en détention provisoire, tandis que trois dockers sont laissés sous contrôle judiciaire.

Une direction basée à Casablanca

C’est en 2024 que les enquêteurs parviennent à localiser le dirigeant du réseau, grâce à une coopération internationale étroite impliquant Europol, Eurojust, ainsi que des services policiers et judiciaires allemands et espagnols. Les éléments recueillis montrent que ce dernier coordonnait depuis Casablanca l’ensemble des flux, qu’il s’agisse de cannabis en provenance du Maroc ou de cocaïne issue d’Amérique latine, notamment de Colombie.

Le parquet de Lille souligne que l’intéressé disposait d’une influence dépassant son propre cercle, avec des connexions établies avec des acteurs majeurs du narcotrafic opérant en France, notamment dans la région marseillaise. Ces collaborations auraient permis l’introduction sur le territoire national de volumes considérables de stupéfiants, destinés à une diffusion à grande échelle et générant des profits estimés à plusieurs millions d’euros.

Arrêté au Maroc en février, le chef présumé du réseau a été remis à la justice française en septembre. Il a été mis en examen pour de multiples chefs d’accusation, dont la direction d’un groupement criminel organisé, l’importation et la cession de stupéfiants, le blanchiment aggravé et des faits de corruption, avant d’être placé en détention provisoire.